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Mariage en Algérie et ordre public international

Le 20 novembre 2011

Ce n'est pas parce qu'un mariage
est célébré en Algérie, que les dispositions prévues par le droit local
doivent être écartées: dès lors que les dispositions ne sont ni
discriminatoires, ni contraires à l'ordre public international, elles
doivent être appliquées.

Tel était précisément le cas en l'espèce, s'agisssant du régime matrimonial applicable:

 

"Attendu que M. Ali X... et Mme Y..., alors domiciliés en Algérie, se sont
mariés sans contrat à une date incertaine (1952) mais en tout cas
antérieure au 19 février 1960, date de la transcription de ce mariage
dans les registres d'état civil, selon le rite religieux musulman devant
le cadi de la Mahakma d'El Amra, (Algérie) ; que les époux ayant
divorcé en 1997 alors que divers immeubles avaient été acquis pendant
leur vie commune en France, Mme Y..., revendiquant l'application du
régime légal français de la communauté de biens, a fait assigner les
onze héritiers de son époux, décédé le 7 décembre 2005, en liquidation
partage de la communauté ainsi alléguée ;

 Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Nîmes, 5 mai
2010) de l'avoir déboutée de ses demandes tendant à voir constater son
statut de "citoyen français" et à voir ordonner la liquidation de
communauté de biens ayant existé entre elle et son mari, alors, selon le
moyen :

 1°/ que la détermination de la loi applicable au régime matrimonial d'époux
mariés sans contrat avant la Convention de La Haye doit être faite en
considération principalement de la fixation du premier domicile
matrimonial ; que cette présomption de volonté peut cependant être
détruite par tout autre élément traduisant la volonté des époux de
soumettre leur régime matrimonial à un droit autre que celui de leur
premier domicile ; qu'en l'espèce Mme Y... avait expressément fait
valoir (conclusions d'appel signifiées le 19 février 2010) que les époux
avaient conservé leur nationalité française après l'indépendance de
l'Algérie en effectuant une déclaration recognitive, qu'ils s'étaient
établis en France dès l'accession de l'Algérie à l'indépendance sans
conserver aucun lien de rattachement avec l'Algérie et qu'ils avaient
investi tous leurs intérêts pécuniaires et professionnels en France ;
que pour retenir que la loi applicable aux époux X... était celle du
droit local, la cour d'appel s'est bornée à retenir que les époux se
sont mariés sans contrat en Algérie selon le rite musulman ; qu'en
statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée, si
les éléments invoqués par Mme Y... ne traduisaient pas la volonté des
époux de se soumettre à la loi française pour la détermination de leur
régime matrimonial, la cour d'appel a privé sa décision de base légale
au regard de l'article 3 du code civil ;

 2°/ que le juge ne saurait statuer par un motif dubitatif ; qu'en énonçant
que "le régime applicable d'après le droit local (...) peut être
considéré comme équivalent à celui de la séparation de biens" pour en
déduire qu'il n'était pas discriminatoire, la cour d'appel s'est
prononcée par un motif dubitatif et a violé l'article 455 du code de
procédure civile ;

 3°/ que les dispositions de la loi étrangère normalement compétente qui
sont contraires à l'ordre public international et à la Convention
européenne des droits de l'homme ne peuvent avoir d'efficacité en France
; qu'en l'espèce, Mme Y... avait soutenu (conclusions d'appel
signifiées le 19 février 2010) que le droit musulman était en
contradiction tant avec la Convention européenne des droits de l'homme
en ce qu'il était discriminant et inégalitaire qu'avec l'ordre public
français en ce qu'il imposait à l'épouse d'obtenir le consentement de
son mari pour pouvoir exercer librement une profession et ne prévoyait
aucune mesure pécuniaire de compensation du préjudice causé par la
dissolution du mariage; qu'en se bornant à retenir que la règle de droit
applicable "ne saurait être considérée comme discriminatoire à l'égard
de l'épouse" par la seule considération qu'elle "consacre un régime de
la séparation de biens prévu par le droit français" sans répondre aux
conclusions de l'exposante invoquant le caractère inégalitaire du droit
musulman, notamment au regard des conséquences de la dissolution du
mariage, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure
civile ;

 Mais attendu que la cour d'appel relève que les époux se sont mariés sans
contrat en Algérie devant le cadi de la Mahakma d'El Amra selon le rite
religieux musulman, qu'ils sont restés dans ce pays, où ils ont fixé
leur premier domicile matrimonial et où sont nés leurs trois premiers
enfants, jusqu'en 1962, date où ils se sont installés en France et ont
opté pour la conservation de la nationalité française ; que, de ces
appréciations souveraines, elle a pu déduire que le premier
établissement des époux en Algérie, stable et durable, consacrait leur
volonté, au moment de leur mariage, d'être régis par le droit local en
vigueur sans que ne soit rapportée la preuve d'éléments postérieurs de
nature à révéler leur volonté de soumettre leur régime matrimonial au
droit commun français ; qu'ensuite, elle a exactement retenu, par un
motif exempt de doute et sans être tenu de répondre à une argumentation
inopérante, que ce droit local, dans la mesure où il consacrait une
autonomie patrimoniale complète entre les époux, pouvait être considéré
comme équivalent au régime de la séparation de biens de droit français
et n'était, dès lors, ni discriminatoire, ni contraire à l'ordre public
international ; que le moyen ne peut être accueilli " (Cass Civ1,26 oct
2011, pourvoi n°10-23298).

 

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