Audition de l'enfant, discernement de l'enfant pour son audition devant les juges
AUDITION DE L’ENFANT MINEUR
L’article 388-1 du Code civil assure le droit de l’enfant à être entendu tandis que l’article 338-4 du Code de procédure civile expose les motifs pour lesquels l’audition d’un enfant lors d’une procédure le concernant peut être refusée.
C’est sur l’appréciation de ces motifs que la Cour de cassation s’est prononcée dans un arrêt du 12 juin 2025 lors d’un litige relatif à la résidence d’un enfant.
Cass, 1re chambre civile, 12 juin 2025, pourvoi n°23-13.900
Par requête du 29 octobre 2020, la mère de l’enfant, née le 11 février 2015, saisit le juge aux affaires familiales afin d’obtenir une décision sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale ainsi que sur la contribution du père à l’entretien et à l’éducation de l’enfant.
Lors de la procédure d’appel, la mère demande que le juge auditionne sa fille âgée de 7 ans. Une lettre manuscrite de l’enfant a été versée au soutien de la demande de Madame.
Par arrêt du 6 juillet 2022, la Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion constate l’exercice conjoint de l’autorité parentale sur l’enfant mineur et se prononce sur le droit de visite et d’hébergement du père tout en rejetant la demande d’audition de l’enfant.
La Cour d’appel refuse une telle audition au motif que la lettre manuscrite rédigée par l’enfant porte sur des événements qui ne peuvent justifier l’audition de l’enfant ainsi qu’en avançant que l’enfant a 7 ans est beaucoup trop jeune. Ce faisant, la Cour d’appel estime que l’enfant n’était pas doté d’un discernement suffisant, sans toutefois fournir de justification concrète. La Cour d’appel refuse aussi au motif que l’audition de l’enfant n’a pas été demandée en première instance.
La mère de l’enfant forme un pourvoi en cassation dans lequel elle conteste le refus d’audition de sa fille par le juge en soutenant que l’enfant souhaitait être entendu, qu’aucune évaluation de son discernement n’avait été menée et que la décision de refus n’avait pas été correctement justifiée. De ce fait, elle argue d’une violation du droit de l’enfant à être entendu.
La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la Cour d’appel.
S’agissant de l’argument selon lequel l’audition n’aurait pas été demandée en première instance, la Cour de cassation donne une réponse implicite. En statuant directement sur le discernement de l’enfant, la Cour de cassation reconnaît ce droit de l’enfant à être entendu pour la première fois en appel. Il n’est donc pas nécessaire que l’enfant ait été entendu en première instance pour être entendu en appel. Cela est d’ailleurs une application de l’article 338-2 du Code de procédure civile qui prévoit que la demande d'audition peut être présentée « en tout état de la procédure et même pour la première fois en cause d'appel ».
Ensuite, la première chambre civile rappelle le droit de l’enfant à être entendu dans toute procédure le concernant à condition qu’il soit capable de discernement puis enchaîne en rappelant que le refus d’auditionner l’enfant doit être motivé par le juge.
4 motifs de refus sont exposés lorsque l’audition est demandée par une des parties, à savoir :
- L’absence de lien de l’enfant avec la procédure ;
- Le défaut de discernement de l’enfant ;
- L’absence de nécessité de l’audition à la solution du litige ;
- La non-conformité de l’audition à l’intérêt de l’enfant.
La Cour de cassation vérifie que le refus d'auditionner l'enfant est effectivement fondé sur l'un de ces motifs, ce qui n’est pas le cas dans l’arrêt de la Cour d’appel.
Par cet arrêt, la Cour de cassation soutient que mentionner l’âge de l’enfant n’est pas une justification suffisante pour refuser l’audition dudit enfant et s’inscrit ainsi dans la continuité de sa jurisprudence (Civ. 1re, 14 avr. 2021, n° 18-26.707 ; Civ. 1re, 18 mars 2015, n° 14-11.392). Il n’appartient pas à la personne sollicitant l’audition de motiver sa demande mais bien à la juridiction de motiver le rejet d’une telle demande pour une des raisons établies par la loi. La Cour d’appel aurait dû rechercher in concreto si l’enfant disposait ou non du discernement.
Cette actualité est associée aux catégories suivantes : Intérêt supérieur de l'enfant
- janvier 2025
- septembre 2024
- juillet 2024
- mars 2024
- novembre 2023
- juillet 2023
-
Par téléphone :
-
Par mail :
-
On vous rappelle :