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Litige successoral indivisible: interruption de la prescription en cas de décès

Le 23 décembre 2022
Litige successoral indivisible: interruption de la prescription en cas de décès
La Cour de cassation rappelle que l'interruption de la prescription en cas de décès de l'une des parties, bénéficie à toutes les parties à l'instance si les actions sont indivisibles. En revanche, cela ne sera pas le cas si les actions sont transmissibles

Cass. Civ. 2e, 8 septembre 2022, pourvoi n°20-23.217

 

               Lorsqu’une instance est interrompue, elle met fin également au délai de péremption. Il faut alors veiller à ce que l’instance ait repris et fait recourir le délai avant de considérer que ce dernier est expiré.

               Par un arrêt rendu le 8 septembre 2022, la 2e Chambre de la Cour de cassation a été amenée à se prononcer sur un litige successoral indivisible.

               En l’espèce, le 9 juillet 2013, le tribunal de première instance a ouvert des opérations de compte, de liquidation et partage de la communauté ayant existé entre une femme et un homme décédé, ordonné la liquidation de l’indivision entre ce dernier et sa sœur, et condamné le fils du couple à rapporter à la succession diverses sommes. Le 13 avril 2017, le décès de la mère a été notifié à l’avocat de l’appelant. Une ordonnance du conseiller de la mise en état a alors constaté la péremption de l’instance.

               La Cour d’appel de Bordeaux a rendu un arrêt le 16 octobre 2020, confirmant l’ordonnance déférée qui avait établi que le jugement du 9 juillet 2013 avait force de chose jugée.

               Un jugement a-t-il automatiquement force de chose jugée si aucune diligence n’a été faite dans un délai de deux ans après une interruption d’instance du fait du décès d’une des parties ?

               La Cour de cassation répond par la négative et casse l’arrêt rendu le 16 octobre 2020 par la Cour d’appel de Bordeaux. Elle considère qu’en jugeant comme elle l’a fait, la Cour d’appel a violé les articles 370, 373, 376 et 392 du Code de procédure civile.

 

I-                 Les conséquences d’une interruption d’instance due au décès d’une des parties

L’article 370 du Code de procédure civile liste les situations qui peuvent engendrer une interruption d’instance. Il s’agit du décès d’une des parties, de la cessation des fonctions d’un représentant légal d’un mineur et de la personne chargée de la protection juridique d’un majeur, et du recouvrement ou de la perte par une partie de sa capacité juridique. Dans cette affaire, la mère du demandeur est décédée, il s’agit alors de la première hypothèse. Il est à noter que dans le cas des actions indivisibles, l’instance s’interrompt au bénéfice de toutes les parties, tandis qu’elle ne s’interrompt qu’au bénéfice des ayants droit dans le cas d’une action transmissible.

L’interruption de l’instance a notamment pour conséquence d’interrompre également le délai de péremption. Celui-ci est défini par l’article 386 du Code de procédure civile qui dispose que l’instance est périmée si aucune des parties n’accomplit des diligences pendant deux ans. Il court à partir de l’introduction de l’instance, et plus spécifiquement au jour de l’enrôlement de l’assignation par une des parties. Ainsi, à compter de ce jour, si aucune diligence n’est effectuée pendant deux ans par les parties, l’instance sera automatiquement éteinte.

En l’espèce, la Cour d’appel a utilisé cet argument pour confirmer l’ordonnance déférée du conseiller de la mise en état ayant considéré que le jugement de première instance était passé en force de chose jugée. Elle a établi l’absence de diligence par les parties entre le 13 avril 2017 et le 13 avril 2019, ce qui justifie selon elle l’extinction de l’instance. Cependant, cet arrêt a été cassé par la 2e Chambre civile de la Cour de cassation.

 

II-               L’exigence de la reprise d’instance pour une reprise du délai de péremption

La Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux en utilisant notamment l’article 392 du CPC selon lequel « l'interruption de l'instance emporte celle du délai de péremption », à l’inverse de la suspension d’instance pendant laquelle le délai de péremption continue de courir. De plus, la 3e Chambre civile avait rendu un arrêt le 26 janvier 2011, affirmant que le délai de péremption demeure interrompu si aucun événement ne redonne prise sur l’instance (Cass. Civ. 3e, 26 janvier 2011, n°09-71.734).

Après avoir confirmé que le décès de la mère du demandeur constituait un motif valable d’interruption d’instance au regard de l’article 370 du précédent Code, elle a alors rappelé la nécessité d’une reprise d’instance pour faire recourir le délai de péremption. En effet, aucun événement en l’espèce n’a fait reprendre l’instance, le délai de péremption était alors toujours suspendu et la période des deux ans pendant lesquels les parties devaient effectuer des diligences n’avait pas lieu de s’appliquer.

Enfin, la Cour de cassation a établi une différence entre une action indivisible et transmissible, ce qui a pour conséquence d’interrompre l’instance, respectivement pour toutes les parties et seulement les ayants droit de la personne décédée. En effet, alors que la Cour d’appel a considéré que le demandeur n’avait accompli aucune diligence pendant 2 ans, de sorte que la péremption d’instance avait lieu d’être affirmée, la Cour de cassation a rappelé qu’il avait la qualité d’ayant droit de sa mère, et qu’il bénéficiait alors également de l’interruption de l’instance, au regard de l’article 370 du Code de procédure civil

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