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Nullité de mariage: consentement: défaut d'intention matrimoniale

Le 29 juillet 2022
Nullité de mariage: consentement: défaut d'intention matrimoniale
Lorsque l'un des époux tunisien se prévaut du défaut d'intention matrimoniale de l'autre époux également tunisien, entrainant la nullité du mariage, les juges doivent apprécier le consentement au regard du droit français

Cour de cassation, 1ère Chambre civile, 18 mai 2022, pourvoi n°21-11.106

Le 18 mai 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt relatif à la loi applicable à la nullité d'un mariage pour défaut d’intention matrimoniale célébré en Tunisie entre deux tunisiens.

En l’espèce, les époux, tous deux de nationalité tunisienne, se sont mariés en Tunisie le 6 juillet 2012. La demanderesse a assigné son époux en nullité de mariage pour erreur sur les qualités essentielles tenant à l’absence d’intention matrimoniale de l’époux, reprochant à ce dernier de ne l’avoir épousé que pour être régularisé sur le territoire français. Elle fut déboutée tant en première instance qu’en appel, les juges du fond considérant que le défaut d’intention matrimoniale n’était pas assez établi. Elle a alors formé un pourvoi en cassation, faisant grief à l’arrêt de la Cour d’appel de Bastia du 20 novembre 2020 d’avoir violé l’article 202-1 alinéa 1er du Code civil en appréciant l’erreur que la demanderesse avait commis sur les qualités essentielles de son époux selon le droit français et non selon le droit tunisien alors que ledit article soumet “les qualités et conditions requises pour contracter mariage” à la loi personnelle de chacun des époux.

L’erreur sur les qualités essentielles tenant au défaut d’intention matrimoniale doit-elle être appréciée selon la loi française ou selon la loi personnelle des époux ?

La Cour de cassation considère que dès lors que l’épouse se prévaut d’un défaut d‘intention matrimoniale, l’action est fondée sur l‘article 146 du Code civil qui dispose “il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a point de consentement”, de sorte que la loi française est applicable, quelle que soit la loi personnelle des époux. 

 

1.       L’application de l’article 202-1 du Code civil

En l’espèce, la Cour de cassation fait application de l’article 202-1 du Code civil qui dispose que « les qualités et conditions requises pour pouvoir contracter mariage sont régies, pour chacun des époux, par sa loi personnelle ». Ce même article renvoie également à l’article 146 du Code civil qui dispose que « il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a point de consentement ». En effet l’article 202-1 du Code civil prévoit que « quelle que soit la loi personnelle applicable, le mariage requiert le consentement des époux, au sens de l’article 146 du Code civil ». En l’occurrence, l’épouse se prévalait d’un défaut d’intention matrimoniale de son époux. Par conséquent, l’action était fondée sur l’article 146 du Code civil. Cela signifie que même si la loi tunisienne était effectivement applicable aux conditions de fond du mariage, le consentement étant toujours exigé en matière de conflits de lois en droit français, il convenait en l’espèce d’apprécier le consentement au regard du droit français. Cet article est considéré comme une loi de police par certains auteurs, alors que d’autres le considère comme une règle spéciale qui ne s’appliquerait qu’en l’absence de convention internationale.

 

2.      Une application rétroactive de l’article 202-1 : un revirement de jurisprudence ?

En l’espèce, la Cour de cassation fait application de l’article 202-1 du Code civil, issu des lois n°2013-404 du 17 mai 2013 et n°2004-873 du 4 août 2014 alors que le mariage dont la demanderesse invoque la nullité a été célébré en 2012. On peut se demander si cet article n’aurait pas dû s’appliquer seulement aux mariages postérieurs à son entrée en vigueur. Il convient alors de se demander si cette solution constitue un revirement de jurisprudence en ce qui concerne l’application de la loi dans le temps. En réalité, cette solution avait déjà été adoptée dans un arrêt du 18 mars 2020, n°19-11.573 qui avait retenu l’application des articles 202-1 et 146 du Code civil à un mariage célébré antérieurement à l’entrée en vigueur des lois du 17 mai 2013 et du 4 août 2014. Dans les deux décisions, la Cour de cassation ne justifie pas l’application de cette disposition de sorte qu’il est impossible de dire si elle est applicable car il s’agit d’une loi de police, d’une règle spéciale ou d’une règle qui ne fait l’objet d’aucune délimitation spatiale.

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